En v’là un, de dimanche, qui n’est pas comme les autres !
Tout a commencé par une banale question, balancée au coin d’un bureau : « ça’t’dit d’essayer des motos, dimanche, dans une forêt à côté de Benslimane… ? ». Le reste de la phrase m’était devenu inintelligible, car mon cerveau était ébloui par les 2 lampes rouges qui s’y étaient alors allumées : MOTO et FORÊT !
Ce que le reste de la phrase précisait n’était pas pour me déplaire. En plus des consignes et équipements de sécurité, j’ai appris que l’essai concernait 3 motos enduros : une 300cc en 2T et, en 4T, une 300 et une 450 ! On est clairement dans le choix des rois de l’enduro, au-dessus des 125 et 250 qui, pourtant, n’ont pas à rougir de leurs performances.
Quant à la marque, SHERCO, même si j’avais l’impression de l’avoir déjà aperçue sur des motos d’ados, elle m’était inconnue à ce moment… plus pour longtemps ! En effet, dès les 1ères informations recueillies à son sujet, elle s’est immédiatement hissée dans mon estime au rang des KTM, HONDA, YAMAHA, et autres leaders du segment.
Pourquoi ?
Tout ça, c’est de la théorie. Passons à présent à la pratique. Que valent vraiment ces bécanes sur les chemins sinueux et broussailleux, tapissés de roches et de poussières, que l’on rencontre dans ces régions forestières de Benslimane ?
Je le découvre moins de 15 minutes après mon arrivée, après un accueil agréable et généreux et une rapide formalité sur la sécurité.
Nous accédons ainsi, en binôme, au 1er essai : la 300cc 4T pour moi et en 2T pour mon binôme !
Dès la prise en main et les 1ers tours de roue sur ces belles montures aux couleurs bleu-blanc-rouge, une sensation est omniprésente, et le sera sur les 3 motos : ce qu’on appelle une moto saine, un mélange de parfait état de fonctionnement, de bons réglages, de qualité de produit et d’efficacité sur le terrain. C’est bien du « Made in France » qu’on a entre les mains. Autres qualités que partagent ces 3 montures : un gabarit relativement petit, un centre de gravité sensiblement bas, et une position de conduite parfaitement naturelle ; des ingrédients qui expliquent leur vocation de motos agiles, efficaces et extrêmement faciles à prendre en main.
Roulant sur 690 KTM, j’appréhendais cette 300 4T. 1ère découverte, elle est d’une facilité déconcertante : elle lit littéralement dans mes pensées ! Il suffit de pencher légèrement la monture d’un côté pour l’inscrire sainement dans le virage, et avec un naturel déconcertant. Je tords la poignée des gaz, la roue arrière part comme je l’imaginais dans ma tête, même en 4ème. Je la relâche, la moto décélère tellement que pas besoin de toucher au frein, surprenante manifestation du couple moteur que je ne m’attendais pas à retrouver sur cette « brelle » – puisque dans la mythologie et les légendes motardes, ce serait l’apanage des « gromonos », statut auquel elle n’accède pas avec ses 300cc.
Je papillonne ainsi gaiement sur les petits sentiers poussiéreux et sinueux de la 1ère moitié du circuit, jouissant de cette aisance de prise en main et du confort d’utilisation qui en découle. Mais dès la 2ème moitié du circuit et les lignes droites – mais en relief – qui le composent, je saisis l’occasion et laisse un peu le moteur s’exprimer. Et là, la moto achève ma séduction ! Quelle bravoure, ce « petit » 300cc !! Quelle bonne volonté qu’est la sienne !! On dirait presque un 2T tellement il monte loin dans les tours, et avec zèle ! Il pousse, il pousse fort, et loin ! Brillamment servie par le châssis léger à haute résistance et les suspensions WP performantes, la bécane fait absolument tout ce qu’on lui dit, comme on le lui dit. Si bien qu’elle m’a entrainée à plus de 90 km/h en pleine forêt ! Elle est d’une efficacité terrible, et je n’ai aucun mal à suivre la 300 2T de mon partenaire, malgré sa puissance supérieure. Je commençais à comprendre tous les titres de championne du monde qu’a décroché la marque… mais je n’avais pas fini que c’était déjà la fin du circuit, et une rapide interrogation de mon corps (à qui l’adrénaline avait fait fermer le clapet jusqu’ici) m’appris qu’une pause s’imposait. C’est donc avec un regard complice et affectueux que j’ai déposé la brave bête, comme si on se promettait de se revoir pour se faire de nouveau plaisir…
Moins de 20 minutes plus tard, j’étais sur la 450 4T, accompagné par la 300 4T. Le représentant Sherco me prévient des réactions du moteur à l’accélération et au freinage… et « comment qu’il a bien fait » ! Mais qu’est-ce qu’il a ce moteur à être « méchant » comme ça, qu’est-ce qu’il a pris au petit déj, du crocodile ? Et encore, il faudrait que ce soit du crocodile énervé ! Comment dire… si le moteur avait des dents, il mordrait ! Plus sérieusement, ce sont les 110 kg de l’ensemble qui permettent à ce 450cc de s’illustrer ainsi, et c’est le propriétaire d’une 650cc KTM qui vous le dit. Moi qui me prenais pour un léger avec les 145 kg de ma katoche face aux 185 Kg des XTR ou aux 212 kg des Transalp, j’ai appris ce que voulait dire légèreté. En comparaison à la mienne, cette moto est une BMX… avec un pégase qui pédale ! J’ai alors compris les raisons de l’évolution générale des motos rallye d’usine vers la révo (réduction des volumes). Par contre, sur ce monstre, oubliez le confort de la facilité de prise en main et dites bonjour aux petites frayeurs et aux montées d’adrénaline. Là, un bon niveau de pilotage est requis. Il faut faire particulièrement attention au dosage des gaz. Une fois que c’est fait et que la moto est bien en main… et bien l’on se retrouve tout simplement avec une moto de compétition ! C’est simple : je n’ai jamais roulé aussi vite et aussi efficacement sur un tel terrain – ce qui s’explique en grande partie par le fait que je n’ai jamais conduit d’enduros jusqu’ici, mais uniquement des trails. La moto est très rapide, elle résiste à tous les reliefs à quasiment toutes les vitesses, mais ça en fait une machine très physique à conduire. Elle nécessite une bonne condition physique.
Ça tombe bien, car à l’arrivée, nous avons profité de la pause pour faire la connaissance d’une des figures des sports mécaniques au Maroc dont le palmarès tient difficilement sur le casque. Il a promis à sportsautomoto.ma un entretien exclusif qui fera bientôt l’objet d’un article.
Après cette pause extrêmement enrichissante, nous sommes passés au dernier essai : la 300 2T pour moi et la 450 4T pour mon accompagnateur. 1ers tours de roue, il manque un truc énorme dont l’absence me déstabilise dans ma conduite : le frein moteur. Il est absolument nul, et ça prend du temps de s’y adapter. Par contre, arrivé aux lignes droites au milieu du parcours, j’ai laissé, avec délectation, s’exprimer le moteur… que je pensais !! J’étais loin du compte. En l’absence de compte-tours, je croyais être plus ou moins en haut régime, quand je n’étais qu’à la moitié. Là, j’ai appris (ou plutôt réappris) 2 choses sur le 2T :
Comment dire en poursuivant la métaphore… si la 450 4T est animée par un monstre qui a mangé du crocodile énervé, alors la 300 2T est animée par un chien enragé sous stéroïdes ! Il est sur le point de sortir ses tripes, tellement il s’emballe !! Tu as envie de lui dire « t’énerves-pas et montre-moi qui a insulté ta mère » ! Je ne sais pas pourquoi, mais conduire ce 2T m’a donné l’impression, un court moment, d’être un salopard, un abominable homme des bois… il y a un petit côté law-limit ! Elle est vraiment enivrante comme machine. C’est celle qui m’a surpris et « dépaysé » le plus de la journée.
Une fois les motos déposées, et alors que nous étions sur le départ, 2 belles « gas3at » de couscous paysan authentique nous ont été servies à tous, pour notre plus grand plaisir. Après cette belle matinée pleine de sensations, de découvertes, de sport et de rencontres, elles ont été particulièrement appréciées.
Je suis ravi d’avoir eu l’opportunité d’essayer ainsi ces 3 motos à la pointe de la performance dans leur segment, et remercie vivement Sherco Maroc pour cette heureuse initiative.
Résumé et fiche technique :
En vieux trailiste confirmé en offroad mais vierge en enduro pur, j’ai bénéficié de la journée de test enduro organisée par Sherco Maroc dans les forêts de Benslimane, pour mon plus grand plaisir.
J’ai découvert 3 motos enduro d’un niveau de qualité et de performances digne de leur manufacture française nîmoise et du palmarès de la marque.
Sherco 300 SEF-SD (4T) :
+ Moto passe-partout et entre toutes les mains, confortablement
+ Maniable et facile à prendre en main
+ Elle reste une vraie machine de sport capable de conduite sportive comme de performances pures
+ Un frein moteur étonnant à cette cylindrée
+ ou – selon chacun : Moto peu extravagante, pas pour ceux qui veulent faire tourner les têtes
– Comme tous les « petits gromonos » modernes (sobres et moins polluants), il n y a plus le fameux « coup de pied au cul » à bas régime
Sherco 450 SEF-SD (4T)
+ Un moteur puissant, avec du caractère et une disponibilité immédiate de la puissance
+ Des performances et des sensations extrêmes, même entre les mains d’un trailiste – prudent cependant
+ Une maniabilité et une agilité étonnantes pour ce « petit gromono »
+ ou – selon chacun : Moto extravagante pour ceux qui veulent faire tourner les têtes
– Comme tous les « gromonos moyens » modernes (sobres et moins polluants), il n y a plus tellement le fameux « coup de pied au cul » à bas régime
Sherco 300 SE-SD (2T)
+ Un moteur puissant, avec une belle rallonge et du caractère
+ Des performances et des sensations extrêmes, même entre les mains d’un trailiste
+ Une maniabilité et une agilité à toute épreuve et à toute vitesse
+ Un comportement global super agressif et joueur…
– … avec néanmoins un petit côté pousse-au-crime à ne pas mettre entre toutes les mains
– Nécessite un bon niveau de pilotage sous peine de grosse gamelle
– Frein moteur absent, déstabilisant pour les non-initiés