Le défi d’un Rallye Raid en 125cc de 40 ans

Après sa participation remarquable au dernier Rallye du Maroc, nous avons voulu vous présenter le pilote qui a rallier l’arrivée avec une moto âgée de 40 ans. Nous vous laissons le découvrir à travers cette interview !

 

Sportautomoto.ma : Bonjour Greg, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Greg : Greg GILSON, 35 ans, en couple. Je porte plusieurs casquettes :

Je suis préparateur mental et technique de pilotes vélo et moto de haut niveau. Je suis aussi spécialiste en communication sur les réseaux sociaux, et organisateur d’événements.

 

Sportautomoto.ma : Depuis quand pratiquez-vous la moto ?

Greg : Je viens du vélo au départ avec 15 ans de BMX Race avec une 3ème place au niveau français dans ma catégorie en 2011. J’étais fan de Motocross et de Jean-Michel Bayle mais comme je n’avais pas trop de moyens, je faisais du vélo.
En 2008 quand je suis arrivé dans le sud de la France, j’ai commencé la PITBIKE en championnat de France et puis en 2012, j’ai rencontré Rodrig Thain (vice-champion du monde d’enduro 2012) et Mathias Bellino (Double Champion du monde 2012/2015 d’Enduro) lors d’un entrainement de vélo. Ensuite ils m’ont prêter une moto pour faire une sortie enduro et là j’ai adoré. Puis, avec beaucoup d’heures de pratique et surtout grâce aux conseils de Mathias, j’ai pu comprendre les techniques de pilotage moto et depuis, je pouvais monter quasiment n’importe quoi ! haha

 

Sportautomoto.ma : Quelles sont vos expériences en compétition ?

Greg : J’adore la compétition parce que mise à part les règles techniques et le respect des autres concurrents, tu n’as pas de limite. J’ai donc fait du BMX Race jusqu’au championnat du monde, VTT de Descente niveau national.
En moto, après quatre saisons de PitBike, j’ai fait un enduro en France. Mais la difficulté technique m’a énormément déçu, donc j’ai plutôt fait des Cross-Country et du Super-Enduro.
Ensuite j’ai suivi Mathias Bellino sur le mondial et le France d’enduro.
J’ai aussi été co-pilote de Rallye asphalte avec un pote « Julien Bourguignon » et nous avons gagné tous les rallyes auxquels nous avons participé.
Début 2019, j’ai participé au DAKAR à bord d’un SSV en tant que co-pilote d’Adrien Goguet (Champion de France de Super Motard). C’est là que j’ai découvert le Rallye-Raid.

 

Sportautomoto.ma : Comment vous est venue l’idée de participer au Rallye du Maroc ?

Greg : Pendant l’été 2018, j’ai acheté une HONDA 125 XLS de 1979 pour me « balader ».
Ces balades se sont vite transformées en sortie enduro en ville et en session free-ride. Je prenais beaucoup de plaisir au guidon de cette moto et plus j’en faisais plus je m’apercevais que nos motos surpuissantes ne sont pas forcément utiles.
En Mai, je participe toujours à l’Enduro Top, une course atypique de 3h avec un tracé qui mélange Enduro, Xtrem et MX. Le samedi je casse une pièce sur mon CRF et je ne peux pas réparer. Seule façon de faire la course du dimanche c’est de prendre ma XLS dans le camion.

C’est donc parti pour 3h de course au guidon de la XLS et vu que j’ai cassé mon CRF la vieille, je suis obligé de prendre le départ à la dernière position. Je pars donc 300ème et malgré un problème de carburateur qui me fait perdre 10 min je finis 140ème et je double donc 160 concurrents avec des motos récentes.
Ensuite je pars en Indonésie pour suivre le team HONDA SR sur 2 MXGP. Là je loue une moto pas importé en Europe (Honda CRF 150 L), et je prends un ultra gros plaisir tout en allant vite et en montant partout.
Je rencontre aussi énormément de gens passionnés de tout-terrain là-bas et je me dis à ce moment-là que l’on est un peu à côté de la plaque en Europe et qu’on a un peu oublier ce qu’était le plaisir et la liberté en tout terrain. On a des motos surpuissantes qu’on exploite à 20%. Elles font un bruit de malade, du coup on se fait interdire de partout, les pièces coutent très chère et il faut les remplacer très souvent.
Je me suis donc dis que j’allais montrer à ces pratiquants que l’on pouvait faire de grandes choses, même avec un petit moteur ! Il fallait une épreuve difficile et assez longues, le Rallye du Maroc était parfait pour ça et donc je me suis inscrit.

 

Sportautomoto.ma : Est-ce qu’il s’agit de votre premier Rallye Raid ?

Greg : En moto oui, en général, non. J’ai participé au DAKAR 2019 au Pérou.

 

Sportautomoto.ma : Pourquoi le choix de cette moto ?

Greg : Pour ouvrir la voie et montrer que les barrières c’est juste dans la tête et que tout le monde peut s’aligner à n’importe quelle course, même s’il n’a pas la dernière moto à la mode.

 

Sportautomoto.ma : Quelle préparation avez-vous fait sur cette moto pour qu’elle puisse participer ?

Greg : Le plus gros du travail était de la rendre conforme au règlement et avoir un allumage en 12V continu pour installer le matériel de navigation. L’autre gros travail a été de fabriquer des supports de cales pieds cross, car les cales pieds d’origine ne tiennent pas.

Sportautomoto.ma : Comment vous êtes-vous préparé physiquement pour ce rallye ?

Greg : Aucune, je bouge tout le temps, roule en moto et vélo quand je peux. La préparation c’est surtout dans la tête qu’il faut la faire. Il faut être prêt à vivre des moments difficiles et ne jamais abandonner !!

 

Sportautomoto.ma : Quel était votre objectif sur ce rallye ?

Greg : Le finir !

J’avoue que quand j’ai vu les résultats du Prologue et que j’avais la moitié des 450 Enduro Cup derrière, je me suis dit : « ok je vais à fond » mais le désert de Merzouga m’a vite calmer lors du stage 2. Il fallait vraiment préserver la machine sinon j’allais casser la boite.

 

Sportautomoto.ma : Après votre chute, quelle était la première chose à laquelle vous avez pensez ?

Greg : Comment je vais pouvoir finir ??

 

Sportautomoto.ma : Que pouvez-vous nous dire sur cette expérience ?

Greg : Premièrement, le Maroc est un pays merveilleux et les Marocains aussi.
Deuxièmement, il ne faut jamais sous-estimer le Désert. Ce n’est pas juste un tas de sable, il faut s’économiser sinon il t’épuise.
Troisièmement, 230 km de liaison sur route à 75 km/h, c’est long !

 

Sportautomoto.ma : Qu’est ce qui a été le plus difficile à gérer pendant le rallye ?

Greg : Le sable. Avec aucune puissance, ce n’est pas la même approche que chez nous. En Europe, il te faut des crans sur les pneus pour accrocher dans le sable humide et ici il faut aller là où il n’y a pas de trace et ne pas casser le sable, tu dois rester sur la couche supérieur.
J’ai brulé mes sillent-block de cloche d’embrayage dans le sable tellement la moto a chauffée. Heureusement la cloche est la même que dans les triporteurs DOCKER, donc mon mécano en a trouvé une à Erfoud.
Sur les chemins caillouteux, j’ai dû talonner de la fourche et de l’amortisseur au moins 1000 fois par spéciale, je pensais que mes poignets allaient casser en roulant.

 

Sportautomoto.ma : Quel est le secret pour pouvoir terminer ce rallye ?

Greg : Si on parle de le finir avec une 450 récente, ce n’est pas très difficile. Par contre, avec une machine comme la 125 XLS, le plus important c’est la détermination. C’est à dire que tu dois rentrer le soir quoi qu’il arrive, c’est ton seul objectif et rien ne peut venir en travers de ta route. Tu dois prendre l’étape dans son intégralité (Liaison + Spéciale), voir combien de km tu as à faire en tout, et calculer la vitesse moyenne qu’il te faut pour revenir de jour.
Dès que c’est dégagé tu attaques, dès qu’il y a du sable tu essayes de t’en sortir en économisant la moto !

 

Sportautomoto.ma : Quel est le budget global qu’il vous a fallu pour ce rallye ?

Greg : Cela a couté dans les environs de 14000 euros dont voici le détail :

Moto : 300
Mécanique + pièces : 3000
Matériel de navigation : 1000
Location GPS + Small Track : 750
Inscription : 3500
Inscription mécano : 2050
Assistance : 1500
Hébergement + Voyage : 1000
Equipement pilote : 1000

 

Sportautomoto.ma : Est-ce que c’était une première pour vous au Maroc ? Qu’est-ce que vous en pensez ?

Greg : Oui une première pour moi au Maroc, j’ai déjà été au Koweït et en Tunisie avant (pour la moto d’ailleurs).
C’est la première fois que l’on me dit «  bienvenue » quand j’arrive au contrôle des passeports. Ensuite les gens sont vraiment sympas et j’aime beaucoup le mode de vie.
Le mec en face de toi ne va pas t’expliquer pendant 1000 ans comment il va faire ceci ou cela. Il le fait et c’est tout. Vous êtes beaucoup moins sujet aux règles inutiles que l’on a en Europe et ça c’est tellement mieux.

 

Sportautomoto.ma : Reviendrez-vous l’année prochaine ?

Greg : Oui je vais revenir l’année prochaine même hors rallye. Je ne sais pas encore avec quelle machine et si je serai pilote ou si je coacherai des jeunes sur des machines à petites cylindrées.
J’ai ouvert la voie et aimerez beaucoup permettre à des jeunes asiatiques ou marocains d’avoir accès à cette discipline sur des machines peu puissantes.
L’avantages des jeunes marocains, c’est qu’ils connaissent déjà les dunes, si tu le coaches bien, ils seront très rapide sur les étapes.
Je sais qu’en Afrique du nord ou en Asie, les jeunes sont vraiment motivés et j’aimerais leur transmettre ce que j’ai appris pendant toutes ces années de compétition et de moto.

Greg : Merci beaucoup SportAutoMoto pour cette interview et à très bientôt.

Crédit photos : Sam Decout / Jules Langeard / Valentin Popineau

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